L’économiste libéral et chroniqueur du New York Times Paul Krugman a applaudi l’administration Biden et ses alliés au sein de l’Organisation du Traité de l’Atlantique Nord (OTAN) pour les sanctions économiques qu’ils ont imposées à la Russie en réponse à son invasion brutale de l’Ukraine – qui a fait des milliers de morts et plus de 4,3 millions de réfugiés ukrainiens fuyant vers d’autres pays, selon les Nations unies. Mais Krugman, dans une chronique cinglante publiée le 7 avril, critique avec véhémence l’Allemagne, membre de l’OTAN.
Selon Krugman, l’Allemagne – la plus grande économie d’Europe – est encore beaucoup trop dépendante du pétrole russe. Et il qualifie l’Allemagne de « maillon le plus faible de la réponse du monde démocratique à l’agression russe ».
« La guerre d’agression (du président russe) Vladimir Poutine fonctionne grâce à l’argent que la Russie obtient en vendant des combustibles fossiles à l’Europe », explique Krugman. « Et tandis que l’Ukraine a, incroyablement, repoussé la tentative de la Russie de s’emparer de Kiev, Poutine ne sera pas définitivement arrêté tant que l’Europe n’aura pas mis fin à sa dépendance énergétique. Ce qui signifie que l’Allemagne – dont les dirigeants politiques et commerciaux insistent sur le fait qu’ils ne peuvent pas se passer du gaz naturel russe, même si nombre de ses propres économistes ne sont pas d’accord – est en fait devenue le principal catalyseur de Poutine. C’est honteux.
L’Allemagne, note Krugman, est « avertie depuis des décennies des risques de devenir dépendante du gaz russe ».
« A la veille de la guerre d’Ukraine, observe Krugman, 55 % du gaz allemand provenait de Russie. Il ne fait aucun doute que couper rapidement, voire réduire fortement, ce flux de gaz serait douloureux. Mais de multiples analyses économiques – de l’Institut Bruegel basé à Bruxelles, de l’Agence internationale de l’énergie et d’ECONtribute, un groupe de réflexion parrainé par les universités de Bonn et de Cologne – ont montré que les effets d’une réduction drastique des importations de gaz en provenance de Russie seraient loin d’être catastrophiques pour Allemagne. »
Le chancelier allemand Olaf Scholz, selon Krugman, manque de « sentiment d’urgence » en ce qui concerne les sanctions contre la Russie.
« Pour être juste », écrit Krugman, « l’Allemagne est passée de sa réticence initiale à aider l’Ukraine. L’ambassadeur d’Ukraine en Allemagne affirme, bien que les Allemands le nient, qu’on lui a dit qu’il était inutile d’envoyer des armes car son gouvernement s’effondrerait en quelques heures. Et peut-être, peut-être, que la prise de conscience que le refus de couper le flux de gaz russe rend l’Allemagne de facto complice d’un meurtre de masse suffira finalement à induire une action réelle. Mais jusqu’à ce que cela se produise ou à moins que cela ne se produise, l’Allemagne continuera, honteusement, d’être le maillon le plus faible de la réponse du monde démocratique à l’agression russe.