Bien qu’il ait passé l’année précédente dans un asile à Saint-Rémy-de-Provence dans le sud de la France, Vincent van Gogh est arrivé dans le village d’Auvers-sur-Oise, juste au nord de Paris, d’humeur optimiste. C’est ici, en 1890, qu’il passera les derniers mois de sa vie qui, malgré la dépression qui allait bientôt revenir, furent les plus productifs.
Cette démarche lui offre la perspective d’un nouveau départ, proche de son frère Théo et sous l’œil attentif de Paul Gachet, médecin homéopathe passionné d’art et de bien-être mental. Au cours des deux mois suivants, Van Gogh a réalisé pas moins de 74 peintures et plus de 50 dessins, catalogués chronologiquement par Nienke Bakker, Emmanuel Coquery, Louis van Tilborgh et Teio Meedendorf dans leur livre Van Gogh à Auvers-sur. -Oise : Ses derniers mois.
Comme Van Tilborgh l’observe dans l’essai d’ouverture, les dernières œuvres de Van Gogh ont pour nous « une signification particulière, presque existentielle ». Les peintures les plus étroitement identifiées à ses derniers jours incluent le profondément mélancolique Champ de blé aux corbeaux (Musée Van Gogh, Amsterdam), dont le chemin central nous mène à travers le blé doré vers un ciel intensément maussade. C’est ici, dans les champs au-dessus d’Auvers, que Van Gogh se suicidera à l’âge de 37 ans en juillet 1890.
Comme le raconte Meedendorf, Van Gogh fut d’abord enchanté par ce village « particulier et pittoresque » niché au cœur de la campagne. Accessible depuis Paris en train, il est resté étonnamment préservé, avec des chaumières blanchies à la chaux et une église médiévale distinctive.
Chez soi dans la nature
Contrairement aux précédents habitants d’Auvers, comme le paysagiste et précurseur de l’impressionnisme Charles-François Daubigny, Van Gogh a ignoré la rivière Oise toute proche. Il a préféré photographier le village, ses vieux bâtiments pittoresques se fondant organiquement dans le paysage et les vignobles environnants. Il a également choisi des motifs étonnamment modernes, comme l’hôtel de ville orné de drapeaux et de banderoles le jour de la Bastille.
Un autre sujet important, exploré par Nienke Bakker, était une série de natures mortes florales, peintes entre fin mai et mi-juin 1890. Van Gogh avait peint des iris et des roses comme « en frénésie » vers la fin de son séjour à Saint-Pierre. Rémy et était optimiste que ses photos trouveraient un acheteur, même si cela n’avait pas été le cas dans le passé.
Il avait une préférence pour les bleuets sauvages, les marguerites, les coquelicots, les renoncules et les chardons, mais il peignait également des asters chinois, des œillets et des soucis, des châtaigniers en fleurs et des acacias, rendus selon des motifs rythmiques qui dominaient l’espace de l’image.
Des fleurs et des épis de blé apparaissent également dans ses portraits, notamment dans les deux portraits du Dr Gachet, appuyé sur son coude dans une pose mélancolique classique et tenant un brin de digitale qu’il utilisait dans ses remèdes homéopathiques.
Gachet fut l’un des premiers partisans importants, non seulement de Van Gogh, mais aussi des artistes impressionnistes Camille Pissarro, qui vivait à proximité de Pontoise, et de Paul Cézanne, qui peignit la maison blanche distinctive de Gachet à Auvers.
Les derniers jours
Le livre comprend une carte utile d’Auvers-sur-Oise qui identifie de nombreux sites sur lesquels Van Gogh a installé son chevalet. L’une d’elles est Tree Roots (Musée Van Gogh, Amsterdam), récemment identifiée comme l’œuvre finale réalisée par l’artiste.
Elle fait partie d’une série de 13 œuvres qui se distinguaient par leur format double carré. Comme l’explique Emmanuel Coquery, le format dérive de Daubigny, auquel fait référence la troisième toile de la série, Le Jardin de Daubigny (Collection Rudolf Staechelin).
Daubigny est encore célébré aujourd’hui dans le village. Sa maison et son atelier, décorés par son ami Camille Corot, ainsi que par ses enfants, ont été conservés pour la postérité. Il en va de même pour la chambre de l’Auberge Ravoux, dans laquelle Van Gogh mourut le 29 juillet 1890.
À juste titre, les deux derniers essais de ce livre brillamment documenté et illustré de manière colorée se concentrent sur les derniers jours de Van Gogh. Après une visite à Theo début juillet, l’artiste a été en proie à une longue période de dépression, provoquée par le sentiment qu’il devenait un fardeau pour son frère.
Dans ses lettres, il écrivait : « Ma vie… est attaquée à la racine même, mon pas aussi vacille. » Il décrit ses derniers paysages comme des expressions de « tristesse, d’extrême solitude ». Finalement, il s’est tiré une balle dans la poitrine avec un revolver et est mort dans les bras de Theo près de deux jours plus tard.
Son corps a été enterré dans un terrain spacieux et ensoleillé du cimetière, à proximité des champs de blé qu’il aimait tant. En 1914, la dépouille de Théo fut transférée dans la même tombe recouverte de lierre, remarquable par sa simplicité.
Comme le montre l’essai final de Bregje Gerritse et Sara Tas, avant même sa mort, Van Gogh commençait à être apprécié par des critiques tels que Gustave Kahn et Albert Aurier.
Il réalise sa seule vente enregistrée lorsque l’artiste belge Anna Boch achète Le Vignoble rouge (Musée national des beaux-arts Pouchkine, Moscou) pour 400 francs. D’ici peu, il obtiendra à titre posthume la renommée et le succès commercial dont il rêvait tant.
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