Dissertation : Le Moyen-Orient, un foyer de conflits majeur depuis 1945
Analyser le sujet
Dégager la problématique
Vous devez montrer ce qui fait du Moyen-Orient le foyer majeur de conflits armés dans le monde depuis 1945.
On peut ainsi formuler la problématique de la façon suivante : Pourquoi les conflits au Moyen-Orient sont-ils au cœur des questions internationales depuis 1945 ?
Construire le plan
Pour expliquer ce qui fait de la région un foyer de conflits majeur, un plan analytique est le plus adapté. En effet, il s’agit de mettre en évidence les facteurs des conflits, leurs protagonistes et la façon dont on tente de les résoudre.
Corrigé
Les titres et les indications entre crochets ne doivent pas figurer sur la copie.
Introduction
[Accroche] Les tensions militaires survenues entre les États-Unis et l’Iran sur le territoire irakien au tournant des années 2019-2020 soulignent combien le Moyen-Orient est une région particulièrement sensible. [Présentation du sujet] En effet, depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale durant laquelle le pétrole a joué un rôle essentiel dans la victoire des Alliés, le Moyen-Orient, en particulier la région du golfe Persique, est le théâtre de nombreux conflits armés aux enjeux souvent mondiaux.
[Problématique] Pourquoi les conflits au Moyen-Orient sont-ils au cœur des questions internationales depuis 1945 ? [Annonce du plan] Pour répondre à cette problématique, nous présenterons d’abord les enjeux mondiaux de ces conflits [I], puis leurs multiples acteurs [II] avant de souligner l’inégale efficacité des modes de leur résolution [III].
I. Des enjeux mondiaux
1. Des enjeux économiques
Le Moyen-Orient possède les plus grandes réserves d’hydrocarbures au monde : 50 % des réserves de pétrole et 40 % des réserves de gaz. C’est donc une région stratégique pour l’approvisionnement énergétique des pays industrialisés comme les États-Unis ou plus récemment la Chine, devenue le premier importateur de pétrole.
Le Moyen-Orient est aussi un lieu de passage incontournable pour le trafic maritime mondial. Le canal de Suez et le détroit de Bab El-Mandeb sont nécessairement empruntés pour les échanges commerciaux entre les pays de l’Union européenne et ceux de l’Asie orientale. Avec 40 % du total, le détroit d’Ormuz constitue un point de passage stratégique pour le trafic pétrolier mondial.
2. Des enjeux politiques
Pendant la guerre froide, la région est divisée entre les alliés des États-Unis et ceux de l’Union soviétique. Parmi les premiers on trouve l’Arabie saoudite, Israël, la Turquie et l’Iran (jusqu’en 1979) ; parmi les seconds, l’Égypte (jusqu’en 1972), la Syrie et l’Irak. Les guerres israélo-arabes, qui opposent l’État hébreu à des coalitions de pays arabes, sont à appréhender à la lumière de la rivalité américano-soviétique.
Dans les années 1990, le Moyen-Orient est le théâtre de l’instauration d’un « nouvel ordre mondial » voulu par les États-Unis. En effet, au lendemain de la victoire de la coalition internationale contre l’Irak durant la guerre du Golfe (1991), la superpuissance américaine se veut la garante du respect du droit international en n’hésitant pas à jouer le rôle de « gendarme du monde ».
Après les attentats du 11 septembre 2001, le Moyen-Orient devient le principal foyer de la lutte contre le terrorisme menée par les États-Unis, leurs alliés occidentaux et la Russie. Dans cette logique, les États-Unis interviennent militairement en Afghanistan, pays qui abrite des camps d’entraînement d’Al-Qaida (2001) puis envahissent l’Irak, soupçonné de soutenir le terrorisme (2003). Plus récemment, les frappes aériennes américaines, occidentales et russes en Syrie ont pour but de détruire les forces de l’organisation terroriste État islamique.
3. Des enjeux culturels
Le Moyen-Orient abrite les lieux saints des religions monothéistes à savoir l’islam, le christianisme et le judaïsme. Ainsi, Jérusalem est le lieu de vives tensions entre Juifs orthodoxes et Arabes musulmans qui revendiquent le libre accès au même sanctuaire : le « mont du Temple » pour les premiers, l’« esplanade des Mosquées » (troisième lieu saint de l’islam) pour les seconds. Tensions d’autant plus vives que Jérusalem, conquise en 1967 et proclamée capitale de l’État hébreu en 1980, est revendiquée par les Palestiniens.
Le Moyen-Orient connaît aussi le déploiement d’un certain nombre d’idéologies transnationales, génératrices de potentiels conflits : en particulier le sionisme, le nationalisme arabe et l’islamisme. Le sionisme, théorisé dès la fin du xixe siècle par Theodor Herzl, a pour objectif de créer un État juif en Palestine. Ce projet se concrétise avec la proclamation de l’État d’Israël en 1948, qui en retour nourrit le nationalisme arabe. Celui-ci vise en effet à défendre les droits des Arabes comme nation voire de les unifier (panarabisme). Cette idéologie a eu ses champions : le président égyptien Nasser dans les années 1950-1960 ; le président irakien Saddam Hussein dans les années 1980. L’islamisme quant à lui préconise l’application de la loi coranique (la charia) dans les États musulmans et le rejet des valeurs occidentales. Il se divise en de nombreux courants et tendances et inspire la politique extérieure de régimes comme celui de la Turquie ou, côté chiite, celui de la République islamique d’Iran.
II. Des acteurs multiples
1. Les États
À différentes échelles, le Moyen-Orient est le théâtre d’affrontements entre puissances. À l’échelle mondiale, s’opposent aujourd’hui les États-Unis et la Russie, à la recherche d’un statut de superpuissance. Ainsi, cette dernière est intervenue de façon décisive dans le conflit syrien en 2015 pour soutenir le régime du président Bachar El-Assad contre l’État islamique et les rebelles anti-Assad. Elle a souligné l’impuissance de la coalition internationale formée autour des États-Unis. À l’échelle régionale, on assiste également à une lutte d’influence entre puissances : actuellement, l’Arabie saoudite et l’Iran s’affrontent indirectement dans de nombreux États (Yémen, Irak, Syrie ou encore Liban).
Comme dans le reste du monde, l’ONU tâche de maintenir la paix. Environ 15 000 Casques bleus ont été envoyés dans la région dans le cadre d’opérations de maintien de la paix comme l’ONUST au Proche-Orient. L’Union européenne, au titre de la PESC (Politique étrangère et de sécurité) intervient également en faveur de la paix dans la région : depuis 2017, une mission civile européenne assiste le gouvernement irakien pour la mise en œuvre d’une stratégie de sécurité.
2. Les acteurs non étatiques
Le Moyen-Orient est le terrain d’action privilégié d’organisations terroristes transnationales comme Al-Qaida et l’organisation État islamique. Contrairement à la stratégie déterritorialisée d’Al-Qaida, l’organisation État islamique s’est taillé de 2014 à 2017 un vaste territoire de 200 000 km2 à cheval sur l’Irak et la Syrie. Ces organisations mènent une guerre asymétrique contre les États de la région comme la Syrie et les puissances étrangères.
Les combattants irréguliers relaient les stratégies des États. Ainsi, aux côtés de la coalition internationale dirigée par les États-Unis, qui intervient principalement par des bombardements aériens, les combattants kurdes luttent au sol contre ceux de l’État islamique. Le désengagement des États-Unis à la fin de l’année 2019 laisse les Kurdes aux prises avec la Turquie qui les combat au même titre que Daech.
III. Des modes de résolution inégalement efficaces
1. Des traités et des processus de paix
Deux traités de paix ont définitivement mis fin à des conflits interétatiques. Après quatre conflits, Israël et l’Égypte signent le traité de Washington en 1979. L’Égypte récupère le Sinaï et reconnaît l’État hébreu. Cependant, le volet palestinien de l’accord, qui prévoit un statut d’autonomie aux Palestiniens des territoires occupés, reste lettre morte. En 1994, un second traité de paix israélo-arabe est signé entre Israël et la Jordanie. Les deux États normalisent leurs relations et règlent les contentieux territoriaux.
En 1993, sous l’impulsion des États-Unis, le Premier ministre israélien Yitzhak Rabin et le dirigeant de l’OLP Yasser Arafat signent les accords d’Oslo. Ceux-ci prévoient la reconnaissance mutuelle d’Israël et d’un État palestinien en échange de l’arrêt du terrorisme palestinien et de la répression israélienne. Ces accords sont complétés en 1995 par les accords d’Oslo II qui précisent le découpage de la Cisjordanie. Mais très vite, le processus de paix israélo-palestinien s’enlise avec l’assassinat de Rabin en 1995, l’opposition du Hamas, parti islamiste rival de l’OLP, la reprise de la colonisation juive en territoire palestinien et le déclenchement de la seconde intifada en 2000. Il est aujourd’hui au point mort.
2. Des cessez-le-feu et des conflits latents
Des cessez-le-feu mettent provisoirement un terme à des conflits internationaux. C’est le cas de la guerre Iran-Irak (1980-1988). Après huit années d’un conflit qui a fait sans doute un million de victimes et a détruit l’économie des deux États belligérants, le Conseil de sécurité de l’ONU adopte à l’unanimité la résolution 598. Celle-ci prévoit la mise en place d’un cessez-le-feu et le retrait des troupes sur la base des frontières internationalement reconnues. Si l’Irak l’accepte aussitôt, il faut attendre l’année suivante pour que l’Iran la valide à son tour.
De nombreux conflits sont en attente de résolution, faute de terrain ou de volonté d’entente. C’est le cas au Yémen, en proie à une guerre civile puis théâtre d’une intervention militaire (nommée « Tempête décisive ») opérée par une coalition dirigée par l’Arabie saoudite en 2015. L’enlisement du conflit opposant par partis interposés cette puissance à l’Iran, a conduit à une catastrophe humanitaire (10 000 morts, famine, choléra). Bien que des pourparlers de paix aient été entamés fin 2018, aucune paix durable ne se profile.
Conclusion
[Réponse à la problématique] Ainsi, depuis 1945, le Moyen-Orient est bien un foyer de conflits majeur à l’échelle mondiale : par ses enjeux, économiques, politiques et culturels ; par la diversité de ses acteurs ; par les modes de résolution qui impliquent souvent les États-Unis ou l’ONU. [Ouverture] Face à la multiplicité des conflits dans la région, Jean-Paul Chagnollaud estime que « si la paix paraît impossible à moyen terme, cela ne signifie pas que le Moyen-Orient soit condamné à une guerre perpétuelle ».