Dissertation
Le patrimoine, un instrument de puissance
Analyser le sujet
Dégager la problématique
Le patrimoine relève de facteurs culturels, mais aussi économiques, politiques et sociaux. Les principales autorités étatiques essaient de laisser leur marque dans un élément patrimonial.
Le patrimoine est utilisé à des fins immédiates pour montrer sa puissance passée et actuelle.
Construire le plan
Un plan thématique permet de vous focaliser sur le patrimoine comme élément de puissance et de privilégier une réflexion globale. Il est préférable à une approche chronologique qui présenterait forcément des différences selon les espaces envisagés.
Corrigé
Les titres et les indications entre crochets ne doivent pas figurer sur la copie.
Introduction
[Accroche] En novembre 2017, lors de la venue en Chine du président Donald Trump, le président Xi Jinping lui fait visiter la Cité interdite, souhaitant ainsi mettre en avant la puissance chinoise par son patrimoine. [Présentation du sujet] Le patrimoine représente l’ensemble des biens, matériels et immatériels, ayant une valeur particulière et devant être transmis aux générations futures. Il est un moyen pour les chefs d’État de montrer leur puissance. Celle-ci est constituée par un ensemble d’éléments permettant d’exercer une influence durable à l’échelle régionale ou mondiale. [Problématique] Dans quelle mesure le patrimoine permet-il aux États de montrer et renforcer leur puissance ? [Annonce du plan] Le patrimoine est d’abord un instrument de développement contribuant à renforcer la puissance d’un État [I], ce patrimoine participe également au rayonnement parmi les autres puissances [II], mais il s’agit également d’une source de conflits aux différentes échelles [III].
I. Le patrimoine, facteur de développement
1. Le patrimoine, un objet de son temps
Durant l’Antiquité et le Moyen Âge, le patrimoine relève du domaine privé. Avec la Renaissance et la mise à l’honneur d’œuvres antiques, les pouvoirs royaux et pontificaux se préoccupent de leur préservation. Aujourd’hui, certaines collections privées trouvent leur place dans des musées d’État comme celui du Prado à Madrid.
La définition de patrimoine se précise au moment de la Révolution française car des œuvres de l’Ancien Régime sont détruites. Le patrimoine revêt alors une charge symbolique et peut être interprété différemment selon les acteurs et l’époque. À Paris, le Panthéon, au xviiie siècle, était prévu pour être une église. Le projet, repensé au cours de la Révolution, aura dès lors vocation à accueillir les corps des « grands hommes », tels Rousseau et Voltaire. Victor Hugo y est même directement inhumé après sa mort en 1885.
2. Une ressource économique et sociale
Le patrimoine est un élément permettant d’identifier certains territoires. Il peut être facteur d’union entre les habitants de ce territoire, qui lui donnent la même fonction, ou bien facteur de division. En Espagne, le monument Valle de los Caídos a été érigé sous Franco pour y accueillir des combattants morts de la guerre civile (1936-1939) nationalistes mais aussi républicains. La sépulture de Franco y est placée à sa mort en 1975, mais, après des années de polémique, elle est retirée en 2019.
Le patrimoine est également un facteur de puissance car il constitue un élément d’attrait pour le tourisme et certains monuments reçoivent des millions de visiteurs chaque année comme le château de Versailles, la statue de la Liberté ou le Taj Mahal.
[Transition] Le patrimoine permet donc un développement local, national et international. Instrument de puissance, il est devenu un objet de dialogue entre différents acteurs à l’échelle mondiale.
II. Le patrimoine dans les relations internationales
1. La vitrine du pays
La patrimonialisation est une pratique qui tend à se renforcer et permet d’identifier certaines cultures. La cuisine mexicaine est ainsi inscrite au patrimoine culturel immatériel de l’Unesco.
Le patrimoine est un instrument du soft power utilisé dans le cadre des relations internationales. Le président Emmanuel Macron a ainsi reçu son homologue russe Vladimir Poutine en 2017 au château de Versailles, avec un déjeuner préparé par le chef Alain Ducasse.
2. Un instrument diplomatique
L’échange culturel se pense comme un approfondissement des relations interétatiques ; c’est le cas du Louvre d’Abu Dhabi créé en accord avec la France.
Le patrimoine participe à la mise en scène du pouvoir. Afin de consolider la position de la Chine dans les relations internationales, Xi Jinping devient le premier dirigeant chinois à s’être rendu à l’Unesco en 2014. Il y a appelé au respect de la diversité culturelle pour contribuer à la paix entre les nations, même si dans le même temps il réprimait la minorité ouighour.
[Transition] Le patrimoine est donc un instrument de dialogue entre les puissances, mais aussi un moyen de mettre le pays en avant.
III. Un patrimoine, source de conflits
1. Les conflits d’usage
À l’échelle locale, le patrimoine provoque des conflits d’usage entre différents acteurs qui peuvent le percevoir comme une ressource à exploiter ou à préserver. C’est le cas de Venise, classée au patrimoine mondial de l’Unesco. Si les restaurateurs et hôteliers veulent attirer un maximum de touristes, des associations entendent limiter cette pratique car les risques de dégradations sont accrus.
Par ailleurs, les destructions sont courantes dans le patrimoine. Se pose alors la question de savoir si l’on reconstruit en étant fidèle à l’œuvre initiale ou s’il faut adapter le monument. L’incendie de Notre-Dame en 2019 illustre ce dilemme.
2. Les menaces géopolitiques
Le patrimoine a régulièrement été pillé ou détruit dans l’histoire car il symbolise la puissance d’autrui. En 2001, en Afghanistan, le régime taliban démolit les bouddhas de Bamiyan construits entre le iiie et le ve siècles alors qu’ils sont inscrits au patrimoine mondial de l’Unesco.
Les États ont signé plusieurs conventions pour protéger le patrimoine dans le cadre des conflits (notamment à La Haye en 1954), mais elles ne concernent que les grandes puissances. En 2014-2015, Daech a ainsi détruit 28 sites en Syrie et Irak. Le Conseil de sécurité de l’ONU a depuis voté une résolution faisant de la destruction du patrimoine culturel un crime de guerre.
Conclusion
[Réponse à la problématique] Si le patrimoine apparaît bien comme un instrument permettant aux États de montrer leur puissance, il en est par ailleurs un symbole et un instrument. Cela explique les concurrences sur le plan patrimonial ainsi que les attaques contre ce patrimoine par différents ennemis. Il permet également de rééquilibrer la perception de la puissance, souvent jugée sur les seuls critères économiques et militaires. [Ouverture] L’affaiblissement de Daech en Syrie et en Irak lève le voile sur l’ampleur de leurs destructions du patrimoine dans cette région. Pourtant, aucun de ces deux pays n’a aujourd’hui les moyens de restaurer ces monuments. Une coopération mondiale devient donc nécessaire pour sauver ce patrimoine séculaire.