Dissertation
Les outils de la politique climatique
Analyser la consigne et dégager une problématique
Problématique. Il faut montrer comment les trois instruments de la politique climatique existants (réglementation, taxation et marché des quotas) limitent les externalités négatives, mais que leur action s’effectue de manière imparfaite.
Exploiter les documents
Document 1. Quelles normes sont utilisées par la réglementation ? Celle-ci est-elle toujours efficace ?
Document 2. Quel est l’objectif de la taxation ? Dans quels domaines est-elle appliquée ? Est-elle si conséquente par rapport au produit intérieur brut (PIB) ?
Document 3. Les quotas échangés ont-ils augmenté en tonnes et en euros ? Les prix sont-ils suffisamment élevés ?
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Introduction
[accroche] En France, depuis janvier 2020, l’achat d’une voiture électrique ne donne plus systématiquement le droit à une prime de 6 000 euros, car certains modèles s’avèrent finalement nuisibles pour l’environnement. [présentation du sujet] En effet, les ressources naturelles renouvelables et non renouvelables se dégradent sous l’effet d’externalités négatives. Pour lutter contre cette dégradation, les pouvoirs publics peuvent utiliser les instruments de la politique climatique que sont la réglementation, la taxation (ou subvention) et le marché des quotas. Leur efficacité reste cependant discutée. [problématique] Nous allons expliquer comment la réglementation, la taxation et le marché des quotas limitent, chacun, les externalités négatives, mais de manière imparfaite. [annonce du plan] Dans une première partie, nous montrerons que ces instruments de la politique climatique ont une certaine efficacité pour protéger l’environnement. Puis, dans une seconde partie, nous verrons que leur portée respective reste cependant limitée.
I. Les instruments de la politique climatique protègent le climat
1. La réglementation protège par la contrainte
La réglementation regroupe l’ensemble des normes juridiques fixées par les pouvoirs publics. Elle vise à édicter des règles, des normes environnementales permettant de limiter les pratiques qui sont à l’origine d’externalités négatives. C’est le cas des normes d’émission qui limitent le niveau de pollution des voitures neuves : celles-ci ne doivent pas « émettre plus de 130 grammes de CO2 par kilomètre » (document 1). Il est possible aussi de recourir à des normes d’utilisation : par exemple, la vignette Crit’air, lancée en 2017, classe les véhicules en fonction de leur niveau d’émissions, et permet d’interdire la circulation des voitures les plus polluantes en cas de pic de pollution. Enfin, la réglementation peut aussi imposer des externalités positives, avec par exemple l’obligation de recycler les appareils en fin de vie.
Les pouvoirs publics cherchent aussi à protéger les biens communs naturels bénéfiques au climat. Ainsi, il n’est pas possible de prélever du bois dans certaines forêts publiques.
2. La taxation internalise les externalités
La taxation permet d’« internaliser les externalités » grâce à un système de taxation et de subvention. Celui-ci consiste d’une part à taxer les externalités négatives et d’autre part à subventionner les externalités positives. En effet, comme le marché ne prend pas en compte les externalités – on dit qu’il est « myope » –, il ne fixe pas les bons prix et ne transmet pas les bonnes incitations. Ainsi, les biens polluants étant moins chers à produire, ils sont encouragés par le marché. L’internalisation des externalités permet alors de fixer des prix exacts et incite les agents économiques à se détourner des biens les plus polluants.
Une taxe de ce type a été mise en place en France pour les voitures. Lors de l’achat d’un véhicule électrique, donc producteur d’externalités positives, les consommateurs bénéficient d’une subvention ; à l’inverse les voitures polluantes sont taxées. En 2008, cette fiscalité environnementale a rapporté plus de 40 milliards d’euros à l’État, dont les deux tiers proviennent des taxes sur l’énergie (document 2).
3. Le marché des quotas détermine un plafond de pollution
Le climat est un bien commun : il est à la fois non exclusif et rival. Or, comme le marché ne prend pas en charge ce type de bien (il est impossible de le facturer parce qu’il est impossible de savoir qui le consomme), le climat est victime de comportements de « passager clandestin ». Le marché des quotas d’émission dans l’Union européenne cherche à limiter les externalités négatives en fixant un plafond maximum de pollution (d’environ 10 000 milliards de tonnes de CO2) et en posant un droit de propriété sur chaque tonne de CO2. Le climat devient alors un bien exclusif et rival, en somme un bien privé, dont le marché peut s’occuper.
Par conséquent, si une entreprise souhaite produire, elle doit utiliser ses quotas ou en acheter sur le marché, au prix fixé par la loi de l’offre et de la demande. Depuis 2005, les volumes et la valeur des transactions ont augmenté fortement : les premiers ont été multipliés par 20 les quatre premières années d’existence de ce système (document 3).
II. Les instruments de la politique climatique sont limités
1. Le niveau de réglementation est difficile à fixer
Si la réglementation est uniforme, elle est plus facilement appliquée par de grandes entreprises, et moins par des petites. Elle peut dégrader la compétitivité des firmes et pénaliser la croissance. De plus, réglementer nécessite une surveillance et donc des institutions avec du personnel qualifié et du matériel, ce qui engendre un coût d’application et de contrôle élevé.
En situation d’information imparfaite, les pouvoirs publics ne connaissent pas l’origine et l’intensité des externalités. Ils peuvent alors prendre de mauvaises décisions en fixant des normes soit trop laxistes, qui n’auront aucun effet, soit trop strictes, qui seront impossibles à respecter. Dans tous les cas, la réglementation n’incite pas à faire mieux, puisqu’une fois la norme respectée il est inutile d’aller au-delà.
2. La taxation n’est que désincitative
La taxation ne représente qu’une faible part du produit intérieur brut (PIB) : 2,1 % en 2008 (document 2). Elle n’empêche pas la pollution puisqu’il suffit de s’acquitter d’une taxe pour continuer à polluer. En revanche, elle peut réduire le pouvoir d’achat des agents économiques qu’elle frappe. Les subventions, quant à elles, ont un coût élevé pour les pouvoirs publics qui distribuent trop généreusement les sommes correspondantes.
Des effets rebond, c’est-à-dire des effets inattendus qui aggravent la situation, peuvent survenir. Par exemple, si l’on rend les voitures électriques moins chères, les consommateurs risquent d’en acheter davantage, ce qui augmentera la production et donc, nécessairement, le niveau de pollution. De même, en présence de biens Veblen, c’est-à-dire de biens dont la demande croît lorsque le prix augmente, la taxation provoque une hausse de leur consommation, et donc de la pollution.
Contrairement au marché des quotas d’émission, la taxation ne fixe pas de plafond maximum de pollution, parce qu’elle ne raisonne que sur la pollution individuelle.
3. Le marché des quotas fixe des prix trop bas
Le marché des quotas européen a un effet limité, tout d’abord parce qu’il ne s’adresse qu’aux grandes entreprises (environ 1 500 en France). De plus, celles-ci bénéficient d’un nombre de quotas trop élevé pour modifier leur comportement polluant.
Le prix déterminé par ce marché des quotas est insuffisant : les économistes estiment qu’il doit se situer autour de 25 euros par tonne pour être désincitatif (document 3). Et certaines périodes de hausse du prix (2008) s’expliquent par des activités spéculatives, réduisant son efficacité.
Enfin, le marché des quotas ne concerne que les émissions de CO2 et il provoque parfois des délocalisations polluantes de la part d’entreprises qui installent une partie de leur production à l’étranger, en général dans les pays pauvres, pour ne pas avoir à subir de contraintes.
Conclusion
[bilan] La réglementation, la taxation et le marché des quotas d’émission sont les trois instruments qui assurent l’équilibre climatique de manière efficace. La première a l’avantage d’agir comme une contrainte, alors que deux autres s’appuient sur des mécanismes incitatifs de marché. Ces instruments comportent tous des limites suffisamment importantes qui obligent à les utiliser de manière complémentaire. [ouverture] Mais peut-on demander le même effort de mise en place de ces trois instruments à tous les pays et en particulier aux plus pauvres, très peu responsables des émissions de CO2 dans le monde ?