Il y a deux périodes dans le Girardin. De 2003 à 2009, l’État regarde le dispositif monter en puissance avec une curieuse indifférence. Un seul fonctionnaire à Bercy est chargé de valider pour tout l’Outre-mer des dossiers complexes de construction d’hôtels, de programmes immobiliers ou de centrales photovoltaïques.
En 2008, la Cour des comptes inspecte à Wallis et Futuna. L’indice qui a donné l’alerte : les inscriptions au registre du commerce et des sociétés explosent, les millions d’euros affluent, alors que l’économie locale est embryonnaire. Les auditeurs de la Cour constatent très vite que Bercy a donné son agrément définitif à des projets fantômes.
Des hôtels sont censés accueillir des clients alors qu’ils ne sont pas construits. C’est le début de la seconde période du Girardin, celle des redressements en série. «Les rappels fiscaux touchent des milliers de contribuables métropolitains, parce qu’ils ont été « embarqués » dans des montages par des cabinets de défiscalisation qui n’auraient pas dû opérer», déplore le député Gilles Carrez à l’Assemblée en 2012.
Au moins un de ces cabinets avait ses entrées au plus haut niveau. Georges Thoma, énarque, contrôleur général à Bercy, a été condamné le 29 juin 2012 à quinze mois de prison avec sursis et 40000€ d’amende pour corruption par le tribunal correctionnel de Paris. Il aidait la société Lynx à faire valider des dossiers Girardin très contestables.
Bilan, plus de de 4000 clients escroqués et redressés par le fisc. En y ajoutant les clients floués par les sociétés SFER, Gesdom, RCI, etc. le Girardin industriel a fait au moins 20000 victimes.
La Cour des comptes a demandé la suppression du dispositif. Il a coûté plus d’un milliard d’euros en 2013 à l’État sans profiter à l’outre-mer. Le Girardin locatif a généré des logements trop chers pour la demande locale. Quant au Girardin industriel, il est d’un rendement désastreux, avec 700000€ de subventions par emploi créé outre-mer, toujours selon le rapport 2012 de la Cour des comptes.